Debout, mais surtout ensemble
Un (bon) reportage de "La Nouvelle République" du 15 avril 2016
Pas massive mais durable, la mobilisation sociale tourangelle organisait sa deuxième Nuit debout jeudi soir place Anatole-France.
Les Nuits debout arrivent à Tours, “ suite logique ” d’un mois de mobilisation. Rencontre avec cette assemblée hétéroclite et conviviale.
Les braises fument entre les gouttes. Barbe grise ou piercing au nez, badge syndical ou sweat-shirt No Logo, ils sont une cinquantaine, place Jean-Jaurès, à refaire le monde autour d’une poignée de merguez. Il est presque 14 h ce jeudi, et la deuxième Nuit Debout tourangelle se prépare. Quatre heures plus tard, place Anatole-France, l’assemblée hétéroclite s’installe pour la soirée. La veille, la première tourangelle de « Merci Patron », dont le réalisateur a initié les Nuits debout, a fait le plein aux Studio.
Pas toujours massif, en tout cas durable, le « mouvement social solidaire », ainsi que le nomment ses porte-parole, s’installe dans le paysage tourangeau. Il s’est implanté sur le campus de Tanneurs début mars, a défilé dans les rues à chaque appel contre la loi travail, et apparaît quotidiennement en différents points de la ville.
On les a vus s’installer sur le parvis des Tanneurs pour des AG mémorables, cuisiner dans de grandes gamelles pour de vastes repas partagés, apparaître au supermarché ou au péage pour des opérations « gratuité », assister, sagement, à des conférences données par des enseignants-chercheurs de l’université, étaler des murs d’expression éphémère au Sanitas… Un mouvement polymorphe est né, cousin des Nuits debout parisiennes, qui comme elles, exprime un « ras-le-bol général ».
" Un mois qu’on est ensemble, et on a l’intention de continuer "
« Le point de départ, c’était la lutte contre la loi Travail, depuis ça a largement dépassé ce seul point », estime Marion, étudiante de 19 ans. Sous le barnum monté pour la journée, puis pour la nuit, les discussions rebondissent autour de la « précarité », des « licenciements », des « profits des entreprises », mais aussi du « partage », des « idées », de « mobilisation »… Pas de révolution, pas encore.
« Les gens se taisent depuis des années, là ils relèvent la tête », constatait avec bienveillance Cécile, une syndicaliste de 46 ans, samedi soir, jour d’inauguration de la première Nuit debout locale. Le micro tourne, chacun s’exprime. En lutte, mais sans amertume. « On arrive tous avec des choses différentes à dire, contre le chômage, les lobbies, la grande distribution… », constate Héloise, 24 ans, en recherche d’emploi dans le Web depuis un an et demi.
Ce qu’ils ont peut-être en commun, ces jeunes et moins jeunes, c’est d’être « perdus » face à un gouvernement de gauche qui les a déçus. Et de se retrouver, enfin, autour d’une dynamique commune. « Cela fait un mois qu’on est ensemble, on s’est organisé, on a lancé beaucoup de choses, et on a bien l’intention de continuer », s’enthousiasme Jayadev, 21 ans.
A un an presque jour pour jour de la prochaine élection présidentielle, beaucoup avouent, en aparté, leur méfiance du « système politique », et surtout, ne « plus savoir pour qui voter ». L’adage dit que la nuit – les Nuits ? – porte conseil.
Pour suivre la mobilisation tourangelle, sur Facebook, voir Les Tourangeaux contre la loi travail.
Mariella Esvant
Solidaires37
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